«Le Nouveau-Brunswick joint l’utile à l’agréable à l’occasion du Festival international de Louisiane» (Au rythme de notre monde dans Le Courrier de la Nouvelle-Écosse, 10 mai 2019)

Lorsqu’on parle de « joindre l’utile à l’agréable », cette locution véhicule l’idée implicite qu’il s’agit de dorer la pilule, de rendre agréable une activité obligatoire qui ne le serait pas forcément sans un ingrédient complémentaire pour en atténuer l’amertume.

Et si l’agréable était utile en soi, jusqu’au point d’accroître l’utilité de l’utile ?

C’est certainement l’impression que je retiens de ma dernière visite à Lafayette à l’occasion du Festival international de Louisiane (FIL), qui vient de se dérouler du 24 au 28 avril. S’y sont rendues plusieurs délégations des provinces Maritimes, dont une mission du Nouveau-Brunswick dirigée par l’honorable Robert Gauvin, vice-premier ministre, ministre du Tourisme, du Patrimoine et de la Culture ainsi que ministre responsable de la Francophonie.

M. Gauvin est aussi, rappelons-le, l’unique membre francophone du cabinet du gouvernement progressiste conservateur de Blaine Higgs. C’était son premier voyage en Louisiane.

Or, le FIL, c’est l’une des deux grandes manifestations culturelles à saveur francophone qui ont lieu annuellement dans la ville de Lafayette, la plaque tournante de la région de l’Acadiane. Alors que les Festivals acadiens et créoles mettent l’accent, chaque mois d’octobre, sur le patrimoine et l’expression musicale du pays, le FIL vise à créer des liens avec les cultures du monde entier. Aux côtés d’artistes du Canada et des États-Unis, la programmation de cette année proposait des groupes venus d’une vingtaine de pays, de la Suède nordique à l’Afrique du Sud.

Pour la toute première fois, il y avait un Pavillon du Nouveau-Brunswick, dans une cour extérieure jouxtant le très sympathique Wurst Biergarten, rue Jefferson. Les festivaliers pouvaient y trouver des stands de quatre partenaires de la « province pittoresque » : l’Université de Moncton, l’Association des enseignant-e-s francophones du Nouveau-Brunswick, le Congrès mondial acadien 2019 et la Commission du tourisme acadien au Canada atlantique (CTACA, qui couvre les quatre provinces de la région). La Société nationale de l’Acadie était également représentée par sa présidente, Louise Imbeault, et sa directrice générale, Véronique Mallet.

La scène Acadie, juste à côté de la tente du Nouveau-Brunswick, présentait des artistes comme Cy et Jacques Surette… de la Nouvelle-Écosse ! (Si le Nouveau-Brunswick paie la note, on est preneur, n’est-ce pas ?) [1]

Leur présence, très appréciée des foules, s’explique par leur association avec Le Grenier Musique, basée à Moncton.

Toute une ambiance pour mieux développer des relations internationales – et on n’a même pas évoqué la nourriture, pourtant omniprésente.

C’est justement ce concours de circonstances qui avait motivé mon déplacement vers mon État d’origine, dans le cadre de mes recherches sur la diaspora acadienne et les rapports Acadie Louisiane. Plus spécifiquement, je m’intéresse de près au jumelage entre les municipalités de Cap-Pelé (N.-B.) et de Broussard (Louisiane). Créée en 1984, cette entente connaît un regain de force à l’approche du prochain Congrès mondial acadien, grâce surtout à deux personnes, Justin LeBlanc, employé du Village de Cap-Pelé, et Jeremy Hildago, son principal interlocuteur à la mairie de Broussard.

Ma visite coïncidait à la fois avec le FIL ainsi qu’avec les vacances de Justin, en compagnie de plusieurs membres de sa famille à qui il voulait faire découvrir sa nouvelle ville d’adoption et faire connaître les gens qui y sont devenus ses amis.

Même dans ce contexte, l’agréable est venu prêter main-forte à l’utile.

Le matin du vendredi 26 avril, vers 10 h, Justin et Jeremy avaient rendez-vous avec deux membres de la délégation néo-brunswickoise, Isabelle Doucet (directrice de la Francophonie internationale et multilatérale) et Manuela Kamdom-Essombé (conseillère à la FIM) ainsi qu’avec Vaughne Madden, directrice générale du CMA 2019. Il s’agissait de la première d’une série de réunions avec des organismes et des représentants gouvernementaux en Louisiane.

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Justin LeBlanc (directeur des événements et des communications, village de Cap-Pelé) avec Isabelle Doucet (directrice de la Francophonie internationale et multilatérale, province du Nouveau-Brunswick) et Manuela Kamdom-Essombé (conseillère à la FIM).

« Il nous paraissait logique d’avoir cette première discussion-là pour confirmer qu’on est là pour appuyer les deux partis et pour tisser des liens économiques », m’a expliqué Mme Doucet, que j’ai rejointe par téléphone après son retour à Fredericton.

La nourriture entre alors en scène : quelqu’un ici veut des écrevisses ? Ou du homard là-bas ?

Liés par un jumelage symbolique depuis 1977, le Nouveau-Brunswick et l’État de la Louisiane ont signé une entente de coopération bilatérale en 2014, lors du dernier CMA. Le Conseil pour le développement du français en Louisiane (CODOFIL), agence d’État chargée de promouvoir le fait francophone, assure la liaison du côté louisianais.

Jusqu’ici les réalisations ont surtout concerné des échanges de groupes de musique pour des festivals. Maintenant qu’arrive le moment de renouveler l’accord, prévu pendant le CMA 2019, il faudrait mieux l’étendre à d’autres secteurs, comme le commerce et l’éducation sans négliger d’autres formes d’art, et cibler davantage les retombées économiques, toujours selon Mme Doucet.

« On voyait un désir de la part des organismes au Nouveau-Brunswick de tisser des liens plus forts avec la Louisiane, de même que du côté de la Louisiane » .

Ces démarches s’inscrivent dans un plan d’action sur trois ans, orienté autour d’objectifs précis en matière de relations avec les pays francophones.

La spécificité de l’axe Acadie Louisiane se fonde certes sur l’histoire commune du peuple acadien, mais avant tout sur des rapports humains. Isabelle Doucet souligne que les membres de la délégation ont été « accueillis de façon spectaculaire », à grand renfort de repas copieux.

Puisque la Louisiane vient de rejoindre l’Organisation internationale de la Francophonie, Isabelle Doucet croit que le Nouveau-Brunswick saura offrir à cet État américain un certain accompagnement dans la mesure où sa province, elle, a déjà intégré la Francophonie internationale malgré ses ressources limitées.

Bien entendu, la conjoncture politique des derniers mois a pu faire douter de l’engagement du Nouveau-Brunswick envers la Francophonie. La visite du ministre Gauvin et de sa délégation envoie donc un signal clair et positif.

Espérons vivement qu’il en sortira des développements qui tireront toute l’Acadie vers l’avant.

[1]

Après la parution de cette chronique dans Le Courrier, j’ai reçu un message d’une personne qui me demandait, en réaction à cette boutade, de préciser que le gouvernement du Nouveau-Brunswick n’a pas assumé les dépenses liées aux déplacements de ces artistes d’origine néo-écossaise, qui avaient été invités par le Festival. Ils ont pu, cependant, bénéficier du Pavillon du Nouveau-Brunswick pour donner des spectacles supplémentaires.

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